Le DRH d’une filiale d’un groupe peut-il licencier un salarié d’une autre filiale ?

M. [C], engagé le 1er octobre 2014 par la société Etablissements Bodin Joyeux, filiale de la société Chanel international BV, en qualité de directeur général, a été licencié le 9 juin 2017 par Mme [E], directrice des ressources humaines de la société Manufactures de mode, autre filiale du groupe, mandatée à cette fin par l'employeur.

La cour d’appel a jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et a condamné l’employeur à payer au salarié diverses sommes à ce titre.

La Cour d’appel de Bourges a en effet retenu l’absence de pouvoir du signataire de la lettre de licenciement ce qui prive celui-ci de cause réelle au motif, notamment, que la société Z-Joyeux ne démontrait pas qu’elle se trouvait être la filiale de la société Manufactures de Mode pour légitimer l’intervention de Mme E-F dans la procédure de licenciement de son salarié.

Pour l’employeur, si la finalité même de l'entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l'employeur de donner mandat à une personne étrangère à l'entreprise pour conduire la procédure de licenciement jusqu'à son terme, il en va différemment pour une personne qui, sans être membre du personnel de la société employeur, est salariée d'une autre société du groupe, sans qu'une telle faculté de donner mandat soit réservée aux salariés de la seule société mère.

Dès lors, la directrice des ressources humaines d'une filiale du groupe auquel appartient la société employeur, pouvait valablement signer la lettre de licenciement.

Néanmoins la Cour de cassation rappelle très clairement que la finalité même de l'entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l'employeur de donner mandat à une personne étrangère à l'entreprise pour procéder à cet entretien et notifier le licenciement.

Dès lors, après avoir relevé qu'il n'était pas démontré que la gestion des ressources humaines de la société Bodin Joyeux relevait des fonctions de la directrice des ressources humaines de la société Manufactures de mode, ni que cette dernière exerçait un pouvoir sur la direction de la société Bodin Joyeux, la cour d'appel en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que la lettre de licenciement avait été signée par une personne étrangère à l'entreprise qui ne pouvait recevoir délégation de pouvoir pour procéder au licenciement.
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Cour de cassation

Chambre sociale

Audience publique du 20 octobre 2021

pourvoi n°20-11.485

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