On ne compte plus aujourd’hui les organisations qui souhaitent prendre soin de leurs collaborateurs au même titre que leurs clients. En témoignent les démarches autour de l’Expérience Collaborateur qui se déploient actuellement au sein des entreprises, avec plus ou moins de succès il faut bien le dire.

De plus en plus de classements récompensent chaque année les entreprises où il fait bon vivre (ex : Top Employeurs, Great Place To Work, etc.). Un site comme Glassdoor, le TripAdvisor de l’entreprise, permet aux collaborateurs d’évaluer leur organisation et leur hiérarchie, sans parler des baromètres internes ou des applications digitales de feedback en temps réel qui privilégient de plus en plus les critères humains.

Au-delà de toutes les tendances actuelles, une révolution est-elle réellement en marche au service d’une entreprise plus humaine ? Où en est-on à l’heure actuelle ?

Les clients d’abord, les employés aussi ! Les entreprises n’y coupent plus.

Cette nécessité de miser plus que jamais sur l’humain résulte d’une conjonction inédite de plusieurs facteurs. Tout d’abord, plus de dix ans après la crise financière qui a induit de fortes surcharges de travail pour mener des projets de transformation sans fin, il était grand temps de faciliter le travail d’équipes épuisées, parfois désengagées, devant être mieux armées face à l’incertitude et le changement permanent de leur environnement.

Notre rapport au travail est aussi en train de changer radicalement. Malgré les difficultés économiques et la précarité de l’emploi, ce ne sont plus les entreprises mais les travailleurs qui deviennent les maitres du jeu sur le marché du travail. Les jeunes talents sélectionnent leurs employeurs en fonction de critères plus humains, à savoir une bonne intégration de leur vie professionnelle et personnelle, une aventure plus entrepreneuriale et en phase avec nos modes de vie modernes où ils pourront avoir le choix de travailler où ils veulent et quand ils veulent. Plus globalement, toutes générations confondues, on est prêt à se donner à fond pour son travail mais plus à n’importe quel prix. L’humain est plus que jamais un facteur clé d’attractivité des talents, d’engagement et donc de compétitivité.

Enfin, face à l’énorme potentiel annoncé de l’intelligence artificielle, ce ne sera bientôt plus la technologie qui fera la différence entre les organisations, celle-ci finira par se banaliser, mais l’humain qui sera créé autour : une culture et des modes relationnels à revisiter de fond en comble, un accompagnement massif afin de maintenir les employés à la pointe.

Une entreprise humainement meilleure n’est pas une quête philanthropique

Les injonctions croissantes de bonheur et de bien-être au travail qui pullulent un peu partout faussent le débat. Il n’est écrit nulle part que l’entreprise ait l’obligation de rendre les gens heureux. En revanche, celle-ci doit mettre tous les moyens en œuvre pour que le collaborateur soit bien dans son travail (ce qui a été amalgamé avec le bien-être). Elle doit aussi rendre sa mission la plus sensée et enthousiasmante possible (ce qui a dérivé à tort en bonheur au travail).

Si on facilite ainsi la vie du collaborateur et qu’on lui donne cœur à faire un travail utile, il y a de fortes chances qu’il soit plus performant et qu’il fasse aussi bon vivre dans l’entreprise.

Que l’humain en entreprise soit un moyen ou une finalité, peu importe, c’est probablement les deux à la fois et c’est tant mieux.

L’heure du tri pour différencier les initiatives de fond des initiatives gadget

Bien que l’on ait peu de recul sur les démarches initiées, il est crucial pour une organisation de faire aujourd’hui les bons choix parce que tout va très vite.

Nous pouvons distinguer les actions anecdotiques, visant à mettre de la poudre aux yeux et celles qui ont un réel impact sur ce qu’on pourrait appeler l’humanité de l’entreprise.

Les premières se cantonnent à offrir des friandises aux collaborateurs, louables mais dérisoires si elles ne reposent sur aucun socle philosophique : des avantages en nature (bonne cantine, cours de yoga ou autre, etc.), des jolis locaux, des team-buildings en tous genres, etc. L’engagement résultant de ces pratiques en vogue est de courte durée et l’effet d’accoutumance du collaborateur à ces bienfaits est rapide.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce ne sont pas les avantages en nature mais l’état d’esprit propre à l’entreprise qui améliore sa dimension humaine. Cet état d’esprit peut s’ancrer autour de quatre intentions fortes :

  • Faciliter la vie du collaborateur : simplification des process, lutte contre les irritants, déploiement d’outils digitaux centrés sur une organisation à challenger en conséquence, vision plus intégrative de notre existence (la flexibilité au travail étant l’avantage le plus plébiscité aujourd’hui par les collaborateurs*).
  • Développer une culture relationnelle enthousiasmante et exigeante : la relation avec son n+1 d’abord car elle reste la première cause de souffrance et de départ des collaborateurs, mais aussi la mise en place d’un vrai code de « savoir vivre ensemble » ou comment se comporter les uns avec les autres (réunions, entretiens, feed-back). Au-delà des GAFA NATU précurseurs sur le sujet, des entreprises françaises comme Michel & Augustin, BlaBlaCar mais aussi Michelin, Danone, Leroy Merlin, pour ne citer qu’elles, en ont fait un levier majeur de leur business model.
  • Donner du sens mais plus n’importe lequel : La seule dimension business ne suffit plus. La dernière étude Universum a confirmé l’aspiration sociétale des jeunes diplômés, ils veulent contribuer à rendre leur monde meilleur. Ainsi, la raison d’être d’une entreprise doit aujourd’hui se confronter à une vision plus engagée que par le passé.
  • Contribuer à l’employabilité future de ses collaborateurs : c’est paradoxalement l’un des meilleurs leviers de fidélisation. Les RH ont intérêt à aimer la data pour suivre les compétences, les attentes et les besoins de chacun. Par exemple, PWC se donne pour mission de maintenir chaque collaborateur au top de leur « digital fitness » (« forme digitale ») et des métiers de demain grâce à un accompagnement individualisé et un assessment continu. Deloitte propose à ses employés de travailler leur « branding personnel » au même titre que de promouvoir la réputation de l’entreprise.

En conclusion, beaucoup d’organisations commencent à se distinguer sur leur marché respectif par leur valeur humaine, d’autant que les réputations sur les réseaux sociaux vont bon train. Néanmoins, elles ne réussiront que si leurs dirigeants affichent la volonté d’ouvrir une réflexion profonde en interne sur ce qu’une organisation humaine signifie au regard de son ADN et de sa vision du monde de demain. Sur le registre de l’humain, il n’est pas possible de faire semblant ni de rester superficiel.


*the Most Desirable Employee Benefits (Harvard Business Review)

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