Nous le savons bien : nos pratiques professionnelles peuvent parfois « tourner » en ne s’appuyant que sur la seule répétition d’habitudes acquises… ce que nous avons coutume d’appeler « la routine ». Cela consiste, essentiellement, à toujours faire une même chose de la même manière, presque mécaniquement, sans plus de réflexion.

Cela est-il, pour autant, systématiquement un mal ?

La marque de l’expérience

Ce serait sous-estimer le fait que lorsque n’interviennent pas de données techniques nouvelles, la répétition des mêmes actes rend l’individu de plus en plus apte à réaliser ce qu’il entreprend. Autrement dit : la routine est aussi la marque de l’expérience ! Et de fait, nul ne saurait acquérir de l’expérience sans la mise en œuvre répétée d’actions professionnelles instaurant une disposition permanente, acquise progressivement, au fil du temps, à effectuer un travail avec facilité et pertinence. Lorsque nous avons appris à conduire, sans doute faisions-nous très attention à ce que faisaient nos pieds et nos mains, avec force réflexion et décomposition des gestes ; il est à espérer qu’aujourd’hui nous n’ayons plus recours à de telles attentions, chaque fois que nous changeons de vitesse ou qu’un quelconque freinage s’impose !

Ce que nous appelons « le savoir-faire » permet précisément une nécessaire et importante économie de la réflexion : nous pouvons accomplir des tâches sans y penser. Le corps, l’organisme, n’a plus besoin de savoir comment il s’engage dans le travail, il l’effectue presque « inconsciemment ». La routine représente ainsi un gain de temps considérable et correspond indéniablement à une certaine maîtrise de l’activité.

Adaptations et innovation

Mais dans le même temps, il est clair que nous devenons moins conscient de la manière dont nous travaillons. Ceci nous conduit à ne plus nous interroger sur les difficultés de ce travail, à ne plus observer les contextes et les environnements où il s’exécute. Lorsqu’on « s’enferme dans la routine », on comprend mal les problèmes rencontrés par les autres pour aborder le même travail ; on évalue difficilement les évolutions techniques qu’il conviendrait éventuellement de prendre en compte pour réaliser aujourd’hui les mêmes choses avec plus de facilité.

Ainsi, l’aspect répétitif de la routine empêche la compétence de s’exprimer et de se réaliser pleinement dans un dialogue avec les autres et dans une recherche régulière des adaptations à réaliser. L’absence de tout questionnement, de toute remise en cause devient alors le frein principal à la dynamique d’innovation qui fait normalement partie du professionnalisme avéré.

Un paradoxe du professionnalisme

Voilà un beau paradoxe du professionnalisme : il exige tout autant d’automatismes efficaces que de questionnements inédits pour assurer… la performance !

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